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20 avril 2020 1 20 /04 /avril /2020 10:06

Dimanche de la Miséricorde : après la crise, ne pas « oublier celui qui est resté en arrière »

Messe à Santo Spirito in Sassia (Homélie complète)

 Homélie du pape François

Dimanche dernier, nous avons célébré la résurrection du Maître. Aujourd’hui, nous assistons à la résurrection du disciple. Une semaine s’est écoulée, une semaine que les disciples, bien qu’ayant vu le Ressuscité, ont passée dans la peur, « les portes verrouillées » (Jn 20, 26), sans même réussir à convaincre de la résurrection l’unique absent, Thomas. Que fait Jésus face à cette incrédulité craintive ? Il revient, il se met dans la même position, « au milieu » des disciples et répète la même salutation : « La paix soit avec vous !» (Jn 20, 19.26). Il recommence tout depuis le début.

La résurrection du disciple commence ici, à partir de cette miséricorde fidèle et patiente, à partir de la découverte que Dieu ne se lasse pas de nous tendre la main pour nous relever de nos chutes. Il veut que nous le voyions ainsi : non pas comme un patron à qui nous devons rendre des comptes, mais comme notre Papa qui nous relève toujours. Dans la vie, nous avançons à tâtons, comme un enfant qui commence à marcher mais qui tombe. Quelques pas et il tombe encore ; il tombe et retombe, et chaque fois le papa le relève. La main qui nous relève est toujours la miséricorde : Dieu sait que sans miséricorde, nous restons à terre, que pour marcher, nous avons besoin d’être remis debout. Et tu peux objecter : ‘‘Mais je ne cesse jamais de tomber !’’. Le Seigneur le sait et il est toujours prêt à te relever. Il ne veut pas que nous repensions sans arrêt à nos chutes, mais que nous le regardions lui qui, dans les chutes, voit des enfants à relever, dans les misères voit des enfants à aimer avec miséricorde.

Aujourd’hui, dans cette église devenue sanctuaire de la miséricorde à Rome, en ce dimanche que saint Jean-Paul II a consacré à la Miséricorde Divine il y a vingt ans, accueillons avec confiance ce message. Jésus a dit à sainte Faustine : « Je suis l’amour et la miséricorde même ; il n’est pas de misère qui puisse se mesurer avec ma miséricorde » (Journal, 14 septembre 1937). Une fois, la Sainte a dit à Jésus, avec satisfaction, d’avoir offert toute sa vie, tout ce qu’elle possédait. Mais la réponse de Jésus l’a bouleversée : « Tu ne m’as pas offert ce qui t’appartient vraiment ». Qu’est-ce que cette sainte religieuse avait gardé pour elle ? Jésus « lui dit avec douceur » : ‘‘Ma fille, donne-moi ta misère’’ » (10 octobre 1937). Nous aussi, nous pouvons nous demander : ‘‘Ai-je donné ma misère au Seigneur ? Lui ai-je montré mes chutes afin qu’il me relève ?’’ Ou alors il y a quelque chose que je garde encore pour moi ? Un péché, un remords concernant le passé, une blessure que j’ai en moi, une rancœur envers quelqu’un, une idée sur une certaine personne… Le Seigneur attend que nous lui apportions nos misères, pour nous faire découvrir sa miséricorde.

Revenons aux disciples ! Ils avaient abandonné le Seigneur durant la passion et ils se sentaient coupables. Mais Jésus, en les rencontrant, ne fait pas de longues prédications. À eux qui étaient blessés intérieurement, il montre ses plaies. Thomas peut les toucher et il découvre l’amour ; il découvre combien Jésus avait souffert pour lui qui l’avait abandonné. Dans ces blessures, il touche du doigt la proximité amoureuse de Dieu. Thomas, qui était arrivé en retard, quand il embrasse la miséricorde, dépasse les autres disciples : il ne croit pas seulement à la résurrection, mais à l’amour sans limites de Dieu. Et il se livre à la confession de foi la plus simple et la plus belle : « Mon Seigneur et mon Dieu ! » (v. 28). Voilà la résurrection du disciple : elle s’accomplit quand son humanité fragile et blessée entre dans celle de Jésus. Là, les doutes se dissipent, là Dieu devient mon Dieu, là on recommence à s’accepter soi-même et à aimer sa propre vie.

Chers frères et sœurs, dans l’épreuve que nous sommes en train de traverser, nous aussi, comme Thomas, avec nos craintes et nos doutes, nous nous sommes retrouvés fragiles. Nous avons besoin du Seigneur, qui voit en nous, au-delà de nos fragilités, une beauté indélébile. Avec lui, nous nous redécouvrons précieux dans nos fragilités. Nous découvrons que nous sommes comme de très beaux cristaux, fragiles et en même temps précieux. Et si, comme le cristal, nous sommes transparents devant lui, sa lumière, la lumière de la miséricorde, brille en nous, et à travers nous, dans le monde. Voilà pourquoi il nous faut, comme nous l’a dit la Lettre de Pierre, exulter de joie, même si nous devons être affligés, pour un peu de temps encore, par toutes sortes d’épreuves (cf. 1P 1, 6).

En cette fête de la Miséricorde Divine, la plus belle annonce se réalise par l’intermédiaire du disciple arrivé en retard. Manquait seul lui, Thomas. Mais le Seigneur l’a attendu. Sa miséricorde n’abandonne pas celui qui reste en arrière. Maintenant, alors que nous pensons à une lente et pénible récupération suite à la pandémie, menace précisément ce danger : oublier celui qui est resté en arrière.

Le risque, c’est que nous infecte un virus pire encore, celui de l’égoïsme indifférent. Il se transmet à partir de l’idée que la vie s’améliore si cela va mieux pour moi, que tout ira bien si tout ira bien pour moi. On part de là et on en arrive à sélectionner les personnes, à écarter les pauvres, à immoler sur l’autel du progrès celui qui est en arrière. Cette pandémie nous rappelle cependant qu’il n’y a ni différences ni frontières entre ceux qui souffrent. Nous sommes tous fragiles, tous égaux, tous précieux. Ce qui est en train de se passer nous secoue intérieurement : c’est le temps de supprimer les inégalités, de remédier à l’injustice qui mine à la racine la santé de l’humanité tout entière !

Mettons-nous à l’école de la communauté chrétienne des origines, décrite dans le livre des Actes des Apôtres ! Elle avait reçu miséricorde et vivait la miséricorde : « Tous les croyants vivaient ensemble, et ils avaient tout en commun ; ils vendaient leurs biens et leurs possessions, et ils en partageaient le produit entre tous en fonction des besoins de chacun » (Ac 2, 44-45). Ce n’est pas une idéologie, c’est le christianisme.

Dans cette communauté, après la résurrection de Jésus, un seul était resté en arrière et les autres l’ont attendu. Aujourd’hui, c’est le contraire qui semble se passer : une petite partie de l’humanité est allée de l’avant, tandis que la majorité est restée en arrière. Et chacun pourrait dire : « Ce sont des problèmes complexes, il ne me revient pas de prendre soin des personnes dans le besoin, d’autres doivent y penser !’’. Sainte Faustine, après avoir rencontré Jésus, a écrit : « Dans une âme souffrante, nous devons voir Jésus crucifié et non un parasite et un poids… [Seigneur], tu nous donnes la possibilité de pratiquer les œuvres de miséricorde et nous nous livrons à des jugements » (Journal, 6 septembre 1937). Cependant, elle-même s’est plainte un jour à Jésus qu’en étant miséricordieux on passe pour un naïf. Elle a dit : « Seigneur, on abuse souvent de ma bonté ». Et Jésus a répondu : « Peu importe, ma fille, ne t’en soucie pas, toi, sois toujours miséricordieuse envers tout le monde » (24 décembre 1937). Envers tous : ne pensons pas uniquement à nos intérêts, aux intérêts partisans.

Saisissons cette épreuve comme une occasion pour préparer l’avenir de tous. En effet, sans une vision d’ensemble, il n’y aura d’avenir pour personne. Aujourd’hui, l’amour désarmé et désarmant de Jésus ressuscite le cœur du disciple. Nous aussi, comme l’apôtre Thomas, accueillons la miséricorde, salut du monde. Et soyons miséricordieux envers celui qui est plus faible : ce n’est qu’ainsi que nous construirons un monde nouveau.

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16 avril 2020 4 16 /04 /avril /2020 10:29

« La privation de l’Eucharistie dans le Corps Mystique », par le fr. Jean-Ariel Bauza-Salinas, op

« La notion d’Eglise domestique »

 

« Quelles seraient les répercussions de cette privation de l’Eucharistie dans le Corps Mystique ? »: à l’occasion du Jeudi Saint, jour d’action de grâce pour le sacerdoce et pour l’Eucharistie, le Fr. Jean-Ariel Bauza Salinas, op, a bien voulu répondre aux questions de Zenit sur la situation actuelle créée par la pandémie et la nécessité d’adopter des règles sanitaires strictes pour enrayer la contagion et vaincre le virus.

Dominicain, licencié en théologie, enseignant en théologie sacramentaire, le Fr. Jean-Ariel Bauza Salinas a été, pendant 10 ans aumônier de l’Institut Bergonié, Centre de Lutte Contre le Cancer (CLCC) de la région Nouvelle-Aquitaine, il a aussi été aumônier diocésain des artistes à Bordeaux. Il est, depuis 2016, Secrétaire général de l’Ordre des Prêcheurs à Rome.

AB

Zenit – Les solutions en ligne ont été très créatives pour continuer à faire passer la Parole de Dieu. Mais comme la pandémie dure, n’est-ce pas une urgence pastorale de réfléchir à des solutions respectant rigoureusement les consignes de sécurité sanitaire mais permettant une vie eucharistique autre que virtuelle?

Fr Jean-Ariel Bauza Salinas – La Parole de Dieu s’adresse à notre ouïe, elle touche nos oreilles, et peut donc être transmise par les médias. Même s’il ne faut pas négliger ce que représente la présence « en vrai » d’une personne à une autre personne… Mais le Corps du Christ touche notre corps de l’intérieur. C’est véritablement un corps à corps qui nous est proposé lorsque nous communions. Le Christ vivant nous saisit quand nous le recevons et cela ne peut pas se vivre virtuellement.

Il y a une urgence pastorale. C’est un mot qui résonne fort dans votre question.

Mais ce qui m’inquiète un peu, – cette inquiétude est partagée par quelques frères et théologiens avec qui j’en parlais cette semaine – c’est le manque, parfois, d’un substrat, d’un « humus » moins moral que théologique, qui nous permettrait de réfléchir aux fondements de notre relation au Christ pour donner, depuis cette base théologique et dans la perspective théologale, une réponse large, entière et… nourrissante. Si l’urgence pastorale entraîne seulement une multiplication de la présence du clergé sur les réseaux sociaux, on passe à côté de quelque chose. La multiplication du Pain de vie doit accompagner cette multiplication de la visibilité ecclésiale et la nourrir.

Concernant la virtualité, bien entendu, il est précieux lorsque l’on est malade, isolé ou confiné, de pouvoir suivre sur internet ou à la télévision la célébration eucharistique. A défaut d’y participer on peut s’associer en direct à ceux qui la célèbrent et beaucoup de pasteurs ont fait tout ce qu’ils pouvaient pour rejoindre ainsi ceux qui leur étaient confiés. Mais cela ne peut pas être le régime habituel des chrétiens et, pour les fêtes de Pâques, alors que nous sommes face au mystère central de notre foi, je peux comprendre que beaucoup de fidèles ressentent comme un manque, un vide. C’est un signe de santé de leur part ! Cela n’est pas bien entendu un « jeûne eucharistique » auquel ils se livreraient – le père François-Marie Léthel en a parlé dans un de ses articles – mais bien une privation de ce qui les fait vivre. Comment y faire face ? Le virtuel n’est pas une solution miracle. Et d’ailleurs, l’approche de la virtualité n’est pas le même partout. On a entendu récemment le théologien orthodoxe Jean Zizioulas, manifester qu’il n’était pas d’accord avec la retransmission de la divine liturgie à la télévision…

On a l’impression que certains prêtres se sont résignés à cette situation et que nombre de fidèles ont renoncé à recevoir la communion. Est-ce bon de se résigner en disant que finalement un temps meilleur viendra où l’on pourra communier ?

Il y a une dimension de la vertu chrétienne qui s’exerce quand on accepte les choses telles qu’elles sont. Le réel dit vrai ! Il est évident que les mesures hygiéniques qu’on nous recommande, et même que nos Etats nous imposent, doivent être scrupuleusement respectées. Le chrétien n’est pas au-dessus des lois. La vraie loi est toujours au service du bien commun. C’est le cas pour les efforts qui nous sont demandés aujourd’hui. Etre ordonné ne fait pas échapper le prêtre aux conditionnements physiques et biologiques. Et parce qu’un curé est appelé à rencontrer un nombre important de personnes différentes en raison de son ministère pastoral, il peut – s’il est malade – contaminer tous ceux qu’il voulait servir !

Mais on pourrait aussi penser à la comparaison qu’a faite le pape François de l’Eglise avec un « hôpital de campagne ». Les ministres du Seigneur qui, après tout, sont aussi « les infirmiers ou les médecins » des âmes, pourraient s’inspirer pour exercer leur action pastorale des exigences sanitaires prises par le corps médical.

Il y a une double question posée par l’impossibilité qu’a le peuple chrétien de se réunir dans l’Eglise afin de célébrer le sacrifice eucharistique : celle de la présence à la Messe et celle de la communion. La célébration de la Messe devant le peuple réuni est sans doute impossible dans les conditions actuelles. C’est douloureux et regrettable mais cette réunion de tous ceux qui constituent l’assemblée représente un facteur de risque important, d’après les spécialistes.

Mais il y a un autre aspect de la question : la communion eucharistique, le contact avec le Corps vivant et vivifiant du Christ. Ne peut-on imaginer, dans le respect de la tradition de l’Eglise, que le Corps eucharistique du Christ soit porté aux fidèles pour qu’ils puissent communier ? Ne le fait-on pas de manière ordinaire pour les malades ? D’ailleurs la présence du tabernacle et de la réserve eucharistique sont historiquement justifiées par la nécessité de leur apporter la communion. J’ai été pendant dix ans aumônier à Bordeaux d’un centre de lutte contre le cancer, l’Institut Bergonié. C’est des centaines de fois que j’ai apporté le Corps du Christ à des personnes hospitalisées…

Concrètement comment faire ? Qui pourrait s’en charger et comment ?

Lors du synode pour l’Amazonie, une des propositions était celle de l’ordination des viri probati. Le souci des Pères synodaux était, selon un évêque, de trouver un moyen de « rendre présente l’eucharistie dans les communautés isolées ». Le Saint-Père n’a pas retenu cette solution dans son Exhortation apostolique. Mais ce que l’on entendait il y a trois mois concernant la nécessité de l’Eucharistie dans ces communautés isolées en Amazonie est toujours actuel. Aujourd’hui le monde connaît une situation globale d’isolement que subissent nos familles, nos communautés religieuses, nos amis célibataires ou seuls enfermés chez eux.

On n’a sans doute pas encore développé suffisamment toutes les richesses offertes par la notion d’Eglise domestique. Il y aurait peut-être à reprendre quelques pratiques de régime eucharistique qui ont fait leurs preuves dans l’église ancienne, ou en temps de danger ou de guerre, soutenant la foi des croyants. Qu’est-ce qui empêche par exemple, de confier aux chefs de famille pratiquant tous les dimanches et qui sont fidèles au sacrement de pénitence, la réserve eucharistique pour qu’ils puissent donner la communion à leurs familles le jour de Pâques, après avoir accueilli le Seigneur sous leur toit, le plus dignement possible ? Ceci vaudrait évidemment pour des fidèles qui passent ce temps de confinement ensemble ou des fidèles isolés.

Bien sûr, il faudrait que s’exerce un jugement, un « discernement » de la part des pasteurs. Il y a aussi des questions pratiques touchant au « comment faire ». Du côté du prêtre cela exigerait qu’il prenne des précautions d’hygiène élevées pour préparer custodes et hosties, sans les avoir manipulées à mains nues. Il faudrait aussi préparer un vade-mecum (texte, vidéo) et les textes liturgiques sur l’administration de l’Eucharistie. Du côté des fidèles, il faudrait préparer ceux qui viendraient recevoir le Corps du Christ pour l’emmener chez eux. En France, en Espagne, en Italie, nombre de châteaux, même aujourd’hui, disposent d’une chapelle privée ! Sans construire une chapelle chez soi, ceux qui recevraient l’Eucharistie à domicile pourraient aménager un endroit digne, priant et beau. De même que nous accueillons symboliquement l’humanité du Christ dans nos crèches, nous pourrions l’accueillir réellement dans nos foyers.

On s’approcherait ainsi de l’idée de « l’Eglise en sortie », « près des gens et moins cléricale ». Pourquoi seuls les clercs ont-ils actuellement la possibilité réelle d’accès au Corps du Christ, les laïcs restant récepteurs des initiatives virtuelles proposée par le clergé ? Le Christ ne peut pas rester dans la sacristie, son Corps dans le tabernacle, alors que les fidèles ne peuvent y accéder… Il en va de même lorsque certaines églises-musées sont davantage fréquentées par des touristes que par des priants. Qui doit sortir prêcher dans les chemins de Galilée ? Dans la phrase « l’Eglise en sortie » le sujet de l’action c’est le Christ et les chrétiens qui sont attachés à Lui. Chrétiens, nous sommes des christophores, des porteurs du Christ en raison de notre baptême, et pour les ministres ordonnés, en raison aussi d’une mission pour le don de son amour miséricordieux. C’est pour cela que les prêtres sont marqués du sceau du Christ, configurés à Lui. Le grand défi est celui d’être ouverts pour laisser passer en nous le Christ, qui va déjà au-devant de nous dans la force de l’Esprit.

En conclusion, il me semble que nous ne pouvons rater quelque chose de très important dans cette épreuve. Nous ne devons pas passer à côté d’une opportunité de renouvellement intérieur, dans le cœur de l’Eglise, dans la ligature, la jointure de ses membres. Il y a là quelque chose de vital, d’essentiel, qui touche les racines mêmes de l’ontologie ecclésiale. L’Eglise, Corps Mystique, vit du Corps vrai. Elle ne vit que de lui, par l’action de l’Esprit. Aucune initiative virtuelle, aucun exercice de piété – même avec des indulgences – ne peut remplacer cet aliment spirituel, le Panis vivus dont des centaines de milliers de laïcs seront privés pour ces fêtes de Pâques. Quelles seraient les répercussions de cette privation de l’Eucharistie dans le Corps Mystique ? Le dépérissement, la mort. Sans le Corps qui donne la vie, l’Eglise se meurt. « Je suis la Voie, la Vérité et la Vie », dit le Seigneur (Jn 14, 6). Prenez et mangez.

 

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13 avril 2020 1 13 /04 /avril /2020 11:24

Confinement en temps de carême, par Ysabel de Andia (2/2)

  1. Confinement en temps de carême (2/2)
  2. De l’isolement à la solitude avec Dieu : le chemin pascal
  3. L’isolement et la solitude

L’isolement quel qu’il soit (être « mis en quarantaine », ou dans des « chambres isolées » à l’hôpital) est une rupture avec les relations humaines. On est privé du réconfort d’une personne, du visage de l’autre et de sa parole. Le silence devient « pesant ».

Mais l’isolement est aussi nécessaire à la prière. Jésus va « à l’écart » pour prier. Cet « écart », cette distance du monde et des siens (les disciples) est un « pas en retrait » du monde vers la transcendance divine.  C’est aussi une entrée dans l’intériorité, le voyage dans ces espaces intérieurs où nous nous découvrons à nu devant Dieu. Cela peut-être une chance, une grâce, une joie : « O beata Solitudo, sola beatitudo », disait saint Bernard. 

  1. La peur de la mort, l’angoisse et l’abandon. Gethsémani.

La mort est là, elle rôde, elle joue avec nous une partie d’échecs comme dans le film d’Ingmar Bergman Le septième sceau, qui se situe au XIVe siècle au moment où la peste noire (autre pandémie) ravage la Suède : « Échec et mat », dit la mort au chevalier. Elle gagne toujours à la fin. La mort entraîne aussi les vivants dans sa danse, comme dans la fresque de la « danse macabre » de l’Abbaye de la Chaise-Dieu.

L’homme se découvre, selon Heidegger, un « être pour la mort ».

La peur est là, la peur de souffrir, la peur de mourir, la peur de ma mort et la peur de la mort de ceux que j’aime.

Cependant cette « pensée de la mort » est salutaire : « Vivre aujourd’hui comme si je devais mourir ce soir », disait le Père de Foucauld. Elle fait partie des « exercices spirituels » de la vie monastique, comme des « dialogues » philosophiques. À ses amis qui se demandent ce qu’ils pourront partager avec lui dans les derniers instants qui lui sont accordés, Socrate répond ainsi : « Un autre regard sur ce qui nous tient et à quoi nous tenons. » Face à la mort, nous apprenons ce qui est essentiel et ce qui est provisoire.

Jésus a vécu cette peur à Gethsémani et son corps s’est couvert de « sueur de sang », mais il a vaincu son angoisse par son abandon entre les mains du Père : « Père non pas ce que je veux, mais ce tu veux » (Mt 26,39//Luc 22,42). Et c’est dans l’abandon de Jésus que nous pouvons aujourd’hui nous abandonner au Père. Et cet abandon est notre repos. « Le Seigneur est mon berger, je ne manque de rien. Sur des prés d’herbe fraîche, il me fait reposer… Si je traverse les ravins de la mort, je ne crains aucun mal, car tu es avec moi. Ton bâton me guide et me rassure » (Ps 22, 1-2.4).

  1. Le triomphe de la vie. Pâques.

Mais le temps du carême ne s’arrête pas au Vendredi Saint, il nous conduit au matin de Pâques, à la Résurrection qui fait éclater le temps et l’espace de la vie limitée ici-bas.

La Résurrection ne peut être vécue que dans la foi, l’espérance et la charité : la Foi, qui témoigne du triomphe de la vie, d’une vie éternelle (temps), l’espérance de l’ouverture des tombeaux et de l’appel au large de l’immensité de la mission (espace), et enfin de la charité, car l’amour n’a pas de limites. « La mesure de l’amour, c’est d’aimer sans mesure ».

La Résurrection est l’ouverture des tombeaux, mais aussi de la porte des enfers et de la porte du paradis, la sortie de tous les enfermements ou « confinements », et cette sortie n’est possible que parce que l’homme est un « homme nouveau » qui est « envoyé » jusqu’aux « confins » de la terre.

L’icône de la Résurrection est celle de la descente aux enfers du Christ qui saisit Adam et Eve pour les faire « sortir » de cet espace clos de la mort et remonter à la vie. 

Conclusion : du Désert à la Résurrection. Lazare

Le chemin pascal du carême va de Gethsémani à Pâques, du désert (Évangile du premier dimanche de carême) à la résurrection de Lazare, signe de la résurrection du Christ et de notre propre résurrection (Évangile du cinquième dimanche de carême).

Jésus se révèle comme « la résurrection et la vie » et demande à Marthe de le croire : « Je suis la résurrection et la vie. Si quelqu’un croit en moi, il vivra » (Jn 11,25). Face à la mort, le seul « salut » est la foi dans le Christ.

Jésus pleure : Voyant Marie et « les Juifs qui l’accompagnaient pleurer », « Jésus pleura. Les Juifs dirent alors : “Voyez comme il l’aimait” » (Jn 11,35). Ces larmes sont des larmes de compassion. Devant la mort de ceux que l’on aime, nous sommes « bouleversés ». Cet « ébranlement » de tout l’être est la prise de conscience que l’homme est mortel, que tout a une fin, que tout passe. Une part de nous-mêmes se détache de nous, celle des êtres que nous ne reverrons plus, un passé qui ne reviendra plus.

Marthe oppose à Jésus le « réalisme » de la mort, sa froidure et son odeur : « il sent déjà » (Jn 11,39). Et de nouveau, Jésus lui demande de le croire : « Ne t’ai-je pas dit que, si tu crois, tu verras la gloire de Dieu » (Jn 11,40). On ne voit pas la gloire de Dieu sans mourir, mais dans la foi dans la résurrection, le passage de la mort à la vie, on voit la gloire de Dieu ; ce que Moïse a demandé, Marthe l’a obtenu.

Alors Jésus prie : « Père, je te rends grâce de ce que tu m’as exaucé » (Jn 11,41-42).

La prière de Jésus d’action de grâces au Père manifeste que les paroles et les actes de Jésus obéissent à la volonté du Père et sont exaucées par le Père. En ce sens, la résurrection est un « sacrifice de louange ».

Enfin Jésus ordonne à Lazare de sortir du tombeau : « Lazare sors ! » (Jn 11,43) et sa forte voix portant la parole du Verbe (« Il parla, et ce qu’il dit exista ; il commanda, et ce qu’il dit survint», Ps 32,9), fait surgir Lazare de la mort à la vie.

 

Ysabel de Andia, philosophe et théologienne française, vierge consacrée du diocèse de Paris, est l’auteur de nombreux livres notamment en patristique.

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9 avril 2020 4 09 /04 /avril /2020 15:01

Déclaration commune des responsables des communautés juive, catholique et musulmane membres de l’UDPP-93 : Union pour le Dialogue, le Partage et la Paix en Seine-Saint-Denis

Le Raincy - 7 avril 2020


Depuis trois semaines, dans notre pays, nous sommes appelés à respecter des règles de confinement. C’est une grande partie de notre planète qui est engagée dans un combat long et patient contre le virus Covid-19. Rester confiné est le seul moyen efficace, aujourd’hui, pour diminuer la propagation de ce fléau, et sauver des vies. Et nous savons, comme croyants, le prix de chaque vie.


Au nom de nos trois grandes religions monothéistes, nous voudrions avant tout avoir une pensée envers toutes les personnes, les familles, éprouvées par les souffrances et la mort, provoquées par cette pandémie. Nous prions pour vous.


Comme beaucoup de nos concitoyens,  vous voudrions avoir une pensée émue pour vous qui êtes engagés au service des malades. Tous les membres des hôpitaux, des maisons de retraite,  tous les médecins, infirmiers, infirmières, aides soignants, qui luttez au quotidien, souvent au péril de votre propre vie,  pour sauver des vies. 

Vous côtoyez de façon brutale et violente la souffrance et la mort, vous êtes confrontés à des décisions éthiques difficiles. Nous prions  pour vous , nous prions pour vos familles.


Notre pensée va vers tous nos gouvernants, au niveau national ou local.  Toutes les décisions que vous avez à prendre sont parfois difficiles et  lourdes de conséquences. Nous prions pour vous.


Notre pensée va aussi envers toutes nos forces de l’ordre, gendarmes et policiers : Vous  veillez à la sécurité et au respect des consignes de confinement au quotidien, parfois dans des conditions et dans des quartiers difficiles. Nous prions pour vous.


Notre pensée va vers vous qui vous engagez à répondre à tous nos besoins de première nécessité. Nous prions pour vous et vos familles. Nous pensons à tous nos enseignants qui vous êtes dévoués à la tâche de l’enseignement à distance pour tous nos enfants et jeunes. Nous vous confions aussi à notre prière.


Notre pensée va vers chacune et chacun d’entre nous. Nous portons chacune et chacun une responsabilité de faire en sorte que, le plus rapidement possible, quand ce sera possible, et pas simplement quand nous l’aurions nous-mêmes décidé, de retrouver la joie et le plaisir de se retrouver en famille, entre amis, entre voisins, que nous puissions reprendre nos activités, sans doutes autrement, que nos enfants et jeunes puissent reprendre un chemin plus serein pour les études. Nous prions pour cela.


Cette semaine commence les fêtes de Pessa’h pour toute la communauté juive : passage de la nuit à la lumière, de l’esclavage à la liberté, signe de la présence du Seigneur près de « ceux qui l’aiment ».

Les chrétiens sont aussi entrés dans la grande Semaine Sainte. Pour eux, Jésus est cette présence du Seigneur, en croix, immolé. Pâques est le passage de la mort à la vie.

Dans les derniers jours d’Avril, les musulmans entreront dans le mois du Ramadan , temps de jeûne, de partage et de prière, temps important de la conversion des cœurs.


Nos trois religions sont « touchées de plein fouet » par les règles de confinement. Nous devons tous célébrer autrement ces grandes fêtes et ces grands moments de chacune de nos religions. Nous avons conscience que c’est difficile, c’est avec regret et tristesse que nous le constatons tous. Cependant, le Dieu , Maître de la vie, auxquels nous mettons tous notre foi, nous invite en tout premier lieu à veiller au respect de la vie parce qu’il en est l’auteur.

Aussi nous adressons à tous nos fidèles ce vibrant appel du respect de la vie de chacune et chacun. Alors respectons le confinement.


 Rabbin Moché LEWIN, Communauté juive
Père Frédéric BENOIST,  Communauté catholique
Imam Lahcene LABLACK,   Communauté musulmane

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8 avril 2020 3 08 /04 /avril /2020 11:34

« Confinement en temps de carême »   1ere Partie

« L’espace limité et le temps désoccupé »

 L’ordre d’un confinement chez soi pour éviter la propagation du Corona-virus nous pose la question du sens d’un confinement en carême.

« Confiner » signifie : « toucher aux confins d’un pays, être à la limite de, tenir enfermé dans d’étroites limites ».  Ces limites, ce sont celles qui nous sont fixées, mais aussi nos propres limites, des limites extérieures, celles de l’espace et du temps, et intérieures : l’homme est un être fini qui reconnaît sa propre finitude. Il n’est pas un Surhomme.

Le « confinement » désigne l’« action de confiner ou d’être confiné ». Toute la différence est là : entre l’actif et le passif, entre ce que l’on veut et ce que l’on subit. Lorsqu’on parle de « se confiner », c’est-à-dire de « se tenir enfermé, s’isoler, se limiter à une occupation, ou se cantonner à », cet enfermement est alors volontaire.

On parle aussi d’« enceinte de confinement » : pour désigner un « bâtiment étanche entourant un réacteur nucléaire », le danger est mortel et la protection contre ce rayonnement mortel est une barrière entre le danger et l’homme.

Qu’en est-il de ce « confinement » en temps de carême ? De quel temps et de quel espace parle-t-on dans le « confinement » ?

 L’espace limité et le temps désoccupé

  • L’espace limité
  1. Le désert

Dans ce temps de confinement comme dans ce temps de carême, il y a un « vide » de l’espace et du temps. L’« espace vide », c’est le désert. L’évangile du premier dimanche de carême est celui de la tentation du Christ au désert. Le désert est habité non par des hommes qui y mourraient de soif, mais par les esprits impurs qui le peuplent. Dans ce vide du désert ou du confinement, les tentations remontent en nous comme des pensées mortifères et obsessionnelles : peurs réelles ou imaginaires, impuissance et découragement… Il ne faut pas dialoguer avec ses pensées, mais leur opposer non pas nos paroles, mais la Parole de Dieu.

  1. La cellule et le cloître

Vivre au désert est l’idéal des « ermites », les solitaires, dont les Apophtegmes des Pères du désert nous ont livré leurs sentences dans des paroles elles-mêmes « resserrées ». Tant d’hommes et de femmes vivent seuls dans les grandes villes, passant du bruit des foules au resserrement de leurs chambres, mais ils n’ont pas goûté à la sagesse de ceux qui aiment le désert et se sont laissés façonner par lui. A la différence du désert qui environne l’ermite à perte de vue (j’ai encore dans les yeux l’immensité du désert au pied de la montagne où se trouve la grotte d’Antoine), le cloître est un espace clos qui est séparé et protégé du « monde » par la « clôture ». Cette séparation marque une appartenance exclusive au Christ, mais les moines cénobites, à la différence des ermites, la vivent en communauté.

  1. L’île

L’île est aussi un espace clos, environné par la mer et le naufragé, qui scrute sans cesse la ligne bleue de l’horizon (la mer est un désert liquide) pour voir si une barque s’aventure, y vit une longue attente. Le naufrage est brutal et accidentel, comme l’irruption de la maladie, et l’île, comme la chambre entourée, une bouée de sauvetage.

Il y a d’autres formes d’espace clos qui ne sont pas une séparation, mais une privation de liberté ou de vie.

  1. La prison

La prison est un enfermement pénitentiel dans une « cellule » dont la porte est verrouillée ! Aujourd’hui, notre porte est ouverte, mais elle est gardée au-dehors par ceux qui nous empêchent de sortir… pour nous défendre contre cet ennemi invisible, le coronavirus !

  1. Le tombeau et les enfers

L’espace le plus resserré est celui du cercueil ou du tombeau. Il n’enferme qu’un corps privé de vie, un corps sans âme, qui est vu sans pouvoir voir. L’âme, selon les croyances religieuses, païennes ou juives, « descend aux enfers », comme Orphée à la recherche d’Euridice dans les Métamorphoses d’Ovide, ou descend au « shéol ». On compare le shéol à l’Hadès ou au Tartare de la mythologie grecque. Le shéol est « le séjour des morts », un monde souterrain, lieu du silence, ténèbres, lieu de l’oubli… dont on ne remonte jamais. 

  • Le temps désoccupé et le temps libre

Et comme l’espace est limité, le temps est « désoccupé », il n’est pas « bien rempli » par des occupations de tout genre. Certes le travail peut se faire « à distance » par le Télétravail, mais pour beaucoup, qui ne peuvent se rendre à leur « lieu de travail », surtout dans les professions manuelles, il n’y a plus de travail et l’incertitude de l’avenir s’installe. On a parlé du « temps suspendu », mais le temps, au contraire, semble très « long » et cette « longueur du temps » qui « ne passe pas » indique la lenteur de l’esprit qui a perdu sa vivacité.

  1. N’avoir rien à faire. Interruption du negotium

Les latins distinguaient le negotium, le « négoce », et l’otium, le loisir.

Le negotium ne signifie pas seulement les « affaires », mais aussi les « choses à faire » qui forment notre quotidien : les courses, les visites, les rendez-vous. Et comme « le temps est désoccupé », comme on n’a « rien à faire », on cherche à s’occuper par les divertissements qu’offrent la TV ou les moyens de communication. Le monde virtuel de l’image remplace le monde réel des corps.

  1. L’otium. Le loisir

Le temps libre peut être vécu comme « oisiveté », traîner sans savoir « quoi faire », mais surtout – et c’est le sens que lui donnait les anciens – comme temps réservé aux « choses de l’esprit », l’étude et la contemplation. L’otium est exprimé par des termes comme « repos », « vacance », ou « sabbat ».

Parce qu’il est un repos, l’otium favorise la contemplation et ce « temps de repos » est un « temps de sabbat ». Parce qu’elle anticipe le repos éternel, la vie monastique, la vie dans le « paradis claustral », est une vie de « loisir ». L’otium est la grande occupation du moine, c’est un loisir très occupé, comme n’ont cessé de répéter Grégoire le Grand dans ses Dialogues, Bernard de Clairvaux et tant d’autres.

(à suivre) Ysabel de Andia, philosophe et théologienne française, vierge consacrée du diocèse de Paris, est l’auteur de nombreux livres notamment en patristique.

 

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7 avril 2020 2 07 /04 /avril /2020 08:30

Le message de notre Evêque pour la Semaine Sainte

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1 avril 2020 3 01 /04 /avril /2020 12:21

Message aux professionnels de santé

Je ne suis ni médecin, ni infirmier, ni aide-soignant, ni kinésithérapeute, ni pompier… mais comme l’ensemble de nos concitoyens, j’admire votre disponibilité et votre attention aux personnes que vous soignez durant quelques heures ou quelques années ! Que de témoignages de reconnaissance entendus à votre sujet et cela, bien avant que ne surgisse la crise actuelle. Que de témoignages entendus aussi, de votre part, pour dénoncer l’écart grandissant entre votre motivation et les moyens mis à votre disposition.

Aujourd’hui alors que vous êtes, comme toujours, les premiers à être confrontés à la souffrance et à la détresse et que vous êtes inquiets pour votre famille et vos proches, je souhaite vous manifester le soutien et la reconnaissance des catholiques de la Seine-Saint-Denis pour ce que vous faites et ce que vous êtes auprès des personnes souffrantes. Votre engagement déterminé, au mépris de votre confort et de votre sécurité, est pour nous un magnifique signe d’espérance.

Quelles que soient vos convictions, religieuses ou philosophiques, permettez-moi de vous dire que chaque jour, avec l’ensemble des catholiques du diocèse, nous prions pour vous. Notre prière n’a rien de magique ! Nous prions Dieu pour qu’à travers vos mains il manifeste son réconfort à ceux qui souffrent. Nous le prions pour qu’il vous donne la force nécessaire pour surmonter l’épreuve quotidienne de vous sentir, peut-être, démunis et impuissants devant l’ampleur de la crise actuelle. Pour les chrétiens débutera dans quelques jours la Semaine sainte qui, chaque année, les entraînent à méditer le mystère de la mort et de la résurrection du Christ.

Tout au long de ces jours saints soyez assurés que nous ne cesserons de penser à vous qui chaque jour, et parfois dans des choix douloureux, êtes confrontés au mystère de la mort et de la vie.

+ Pascal Delannoy, Evêque de Saint-Denis en France Le 30 mars 2020.

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28 mars 2020 6 28 /03 /mars /2020 17:30

 

Ce jour-là, le soir venu, il dit à ses disciples : « Passons sur l’autre rive. » Quittant la foule, ils emmenèrent Jésus, comme il était, dans la barque, et d’autres barques l’accompagnaient.

 Survient une violente tempête. Les vagues se jetaient sur la barque, si bien que déjà elle se remplissait. Lui dormait sur le coussin à l’arrière. Les disciples le réveillent et lui disent : « Maître, nous sommes perdus ; cela ne te fait rien ? »

 Réveillé, il menaça le vent et dit à la mer : « Silence, tais-toi ! » Le vent tomba, et il se fit un grand calme.

 Jésus leur dit : « Pourquoi êtes-vous si craintifs ? N’avez-vous pas encore la foi ? »

 Saisis d’une grande crainte, ils se disaient entre eux : « Qui est-il donc, celui-ci, pour que même le vent et la mer lui obéissent ? »

Marc 4,35-41

 

 

 

« L’heure du choix »

 

 

 

 

Méditation du pape François sur la place saint Pierre à l’occasion de la bénédiction exceptionnelle « Ubi et Orbi » du 27 Mars 2020

«Le soir venu» (Mc 4, 35). Ainsi commence l’Evangile que nous avons écouté. Depuis des semaines, la nuit semble tomber. D’épaisses ténèbres couvrent nos places, nos routes et nos villes; elles se sont emparées de nos vies en remplissant tout d’un silence assourdissant et d’un vide désolant, qui paralyse tout sur son passage: cela se sent dans l’air, cela se ressent dans les gestes, les regards le disent. Nous nous retrouvons apeurés et perdus. Comme les disciples de l’Evangile, nous avons été pris au dépourvu par une tempête inattendue et furieuse. Nous rendons compte que nous nous trouvons dans la même barque, tous fragiles et désorientés, mais en même temps tous importants et nécessaires, tous appelés à ramer ensemble, tous ayant besoin de nous réconforter mutuellement. Dans cette barque… nous trouvons tous. Comme ces disciples qui parlent d’une seule voix et dans l’angoisse disent: «Nous sommes perdus» (v. 38), nous aussi, nous nous apercevons que nous ne pouvons pas aller de l’avant chacun tout seul, mais seulement ensemble.

Il est facile de nous retrouver dans ce récit. Ce qui est difficile, c’est de comprendre le comportement de Jésus. Alors que les disciples sont naturellement inquiets et désespérés, il est à l’arrière, à l’endroit de la barque qui coulera en premier. Et que fait-il? Malgré tout le bruit, il dort serein, confiant dans le Père – c’est la seule fois où, dans l’Evangile, nous voyons Jésus dormir –. Puis, quand il est réveillé, après avoir calmé le vent et les eaux, il s’adresse aux disciples sur un ton de reproche: «Pourquoi êtes-vous si craintifs? N’avez-vous pas encore la foi?» (v. 40).

Cherchons à comprendre. En quoi consiste le manque de foi de la part des disciples, qui s’oppose à la confiance de Jésus? Ils n’avaient pas cessé de croire en lui. En effet, ils l’invoquent. Mais voyons comment ils l’invoquent: «Maître, nous sommes perdus; cela ne te fait rien?» (v. 38). Cela ne te fait rien: ils pensent que Jésus se désintéresse d’eux, qu’il ne se soucie pas d’eux. Entre nous, dans nos familles, l’une des choses qui fait le plus mal, c’est quand nous nous entendons dire: “Tu ne te soucies pas de moi?”. C’est une phrase qui blesse et déclenche des tempêtes dans le cœur. Cela aura aussi touché Jésus, car lui, plus que personne, tient à nous. En effet, une fois invoqué, il sauve ses disciples découragés.

La tempête démasque notre vulnérabilité et révèle ces sécurités, fausses et superflues, avec lesquelles nous avons construit nos agendas, nos projets, nos habitudes et priorités. Elle nous démontre comment nous avons laissé endormi et abandonné ce qui alimente, soutient et donne force à notre vie ainsi qu’à notre communauté. La tempête révèle toutes les intentions d’“emballer” et d’oublier ce qui a nourri l’âme de nos peuples, toutes ces tentatives d’anesthésier avec des habitudes apparemment “salvatrices”, incapables de faire appel à nos racines et d’évoquer la mémoire de nos anciens, en nous privant ainsi de l’immunité nécessaire pour affronter l’adversité.

À la faveur de la tempête, est tombé le maquillage des stéréotypes avec lequel nous cachions nos “ego” toujours préoccupés de leur image ; et reste manifeste, encore une fois, cette appartenance commune (bénie), à laquelle nous ne pouvons pas nous soustraire: le fait d’être frères.

«Pourquoi êtes-vous si craintifs? N’avez-vous pas encore la foi?». Seigneur, ce soir, ta Parole nous touche et nous concerne tous. Dans notre monde, que tu aimes plus que nous, nous sommes allés de l’avant à toute vitesse, en nous sentant forts et capables dans tous les domaines. Avides de gains, nous nous sommes laissé absorber par les choses et étourdir par la hâte. Nous ne nous sommes pas arrêtés face à tes rappels, nous ne nous sommes pas réveillés face à des guerres et à des injustices planétaires, nous n’avons pas écouté le cri des pauvres et de notre planète gravement malade. Nous avons continué notre route, imperturbables, en pensant rester toujours sains dans un monde malade. Maintenant, alors que nous sommes dans une mer agitée, nous t’implorons: “Réveille-toi Seigneur!”.

«Pourquoi êtes-vous si craintifs? N’avez-vous pas encore la foi?». Seigneur, tu nous adresses un appel, un appel à la foi qui ne consiste pas tant à croire que tu existes, mais à aller vers toi et à se fier à toi. Durant ce Carême, ton appel urgent résonne : “Convertissez-vous”, «Revenez à moi de tout votre cœur» (Jl 2, 12). Tu nous invites à saisir ce temps d’épreuve comme un temps de choix. Ce n’est pas le temps de ton jugement, mais celui de notre jugement: le temps de choisir ce qui importe et ce qui passe, de séparer ce qui est nécessaire de ce qui ne l’est pas. C’est le temps de réorienter la route de la vie vers toi, Seigneur, et vers les autres. Et nous pouvons voir de nombreux compagnons de voyage exemplaires qui, dans cette peur, ont réagi en donnant leur vie. C’est la force agissante de l’Esprit déversée et transformée en courageux et généreux dévouements. C’est la vie de l’Esprit capable de racheter, de valoriser et de montrer comment nos vies sont tissées et soutenues par des personnes ordinaires, souvent oubliées, qui ne font pas la une des journaux et des revues ni n’apparaissent dans les grands défilés du dernier show mais qui, sans aucun doute, sont en train d’écrire aujourd’hui les évènements décisifs de notre histoire: médecins, infirmiers et infirmières, employés de supermarchés, agents d’entretien, fournisseurs de soin à domicile, transporteurs, forces de l’ordre, volontaires, prêtres, religieuses et tant et tant d’autres qui ont compris que personne ne se sauve tout seul. Face à la souffrance, où se mesure le vrai développement de nos peuples, nous découvrons et nous expérimentons la prière sacerdotale de Jésus: «Que tous soient un » (Jn 17, 21). Que de personnes font preuve chaque jour de patience et insufflent l’espérance, en veillant à ne pas créer la panique mais la co-responsabilité! Que de pères, de mères, de grands-pères et de grands-mères, que d’enseignants montrent à nos enfants, par des gestes simples et quotidiens, comment affronter et traverser une crise en réadaptant les habitudes, en levant les regards et en stimulant la prière! Que de personnes prient, offrent et intercèdent pour le bien de tous. La prière et le service discret: ce sont nos armes gagnantes!

«Pourquoi avez-vous peur? N’avez-vous pas encore la foi? ». Le début de la foi, c’est de savoir qu’on a besoin de salut. Nous ne sommes pas autosuffisants; seuls, nous faisons naufrage: nous avons besoin du Seigneur, comme les anciens navigateurs, des étoiles. Invitons Jésus dans les barques de nos vies. Confions-lui nos peurs, pour qu’il puisse les vaincre. Comme les disciples, nous ferons l’expérience qu’avec lui à bord, on ne fait pas naufrage. Car voici la force de Dieu: orienter vers le bien tout ce qui nous arrive, même les choses tristes. Il apporte la sérénité dans nos tempêtes, car avec Dieu la vie ne meurt jamais.

Le Seigneur nous interpelle et, au milieu de notre tempête, il nous invite à réveiller puis à activer la solidarité et l’espérance capables de donner stabilité, soutien et sens en ces heures où tout semble faire naufrage. Le Seigneur se réveille pour réveiller et raviver notre foi pascale. Nous avons une ancre: par sa croix, nous avons été sauvés. Nous avons un gouvernail: par sa croix, nous avons été rachetés. Nous avons une espérance: par sa croix, nous avons été rénovés et embrassés afin que rien ni personne ne nous sépare de son amour rédempteur. Dans l’isolement où nous souffrons du manque d’affections et de rencontres, en faisant l’expérience du manque de beaucoup de choses, écoutons une fois encore l’annonce qui nous sauve: il est ressuscité et vit à nos côtés. Le Seigneur nous exhorte de sa croix à retrouver la vie qui nous attend, à regarder vers ceux qui nous sollicitent, à renforcer, reconnaître et stimuler la grâce qui nous habite. N’éteignons pas la flamme qui faiblit (cf. Is 42, 3) qui ne s’altère jamais, et laissons-la rallumer l’espérance.

Embrasser la croix, c’est trouver le courage d’embrasser toutes les contrariétés du temps présent, en abandonnant un moment notre soif de toute puissance et de possession, pour faire place à la créativité que seul l’Esprit est capable de susciter. C’est trouver le courage d’ouvrir des espaces où tous peuvent se sentir appelés, et permettre de nouvelles formes d’hospitalité et de fraternité ainsi que de solidarité. Par sa croix, nous avons été sauvés pour accueillir l’espérance et permettre que ce soit elle qui renforce et soutienne toutes les mesures et toutes les pistes possibles qui puissent aider à nous préserver et à sauvegarder. Étreindre le Seigneur pour embrasser l’espérance, voilà la force de la foi, qui libère de la peur et donne de l’espérance.

«Pourquoi êtes-vous si craintifs? N’avez-vous pas encore la foi? » Chers frères et sœurs, de ce lieu, qui raconte la foi, solide comme le roc, de Pierre, je voudrais ce soir vous confier tous au Seigneur, par l’intercession de la Vierge, salut de son peuple, étoile de la mer dans la tempête. Que, de cette colonnade qui embrasse Rome et le monde, descende sur vous, comme une étreinte consolante, la bénédiction de Dieu.

Seigneur, bénis le monde, donne la santé aux corps et le réconfort aux cœurs. Tu nous demandes de ne pas avoir peur. Mais notre foi est faible et nous sommes craintifs. Mais toi, Seigneur, ne nous laisse pas à la merci de la tempête. Redis encore : « N’ayez pas peur » (Mt 28, 5). Et nous, avec Pierre, “nous nous déchargeons sur toi de tous nos soucis, car tu prends soin de nous” (cf. 1P 5, 7).

 

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18 mars 2020 3 18 /03 /mars /2020 18:11

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23 mai 2019 4 23 /05 /mai /2019 16:22

« Réparons l’Eglise » : Cette formulation fait écho à l’appel à l’origine de la vocation de Saint François d’Assise : « Va, répare mon Église en ruine ». C’est une invitation à poser un diagnostic sur la situation actuelle de l’Église, mais aussi à faire acte de proposition pour une plus grande fidélité à l’Évangile. Une synthèse de toutes les réponses des catholiques de France sera ensuite produite par les trois médias La Croix, Croire et le Pèlerin.

 

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